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In horis aeternum





Une voile au loin sur l'immuable monotonie d'une mer somnolente,
monde de pouvoir apaisé dans des symboles de couleur, interminablement silencieux; au-dessus du mât, comme une balle d'or lancée par les dieux dans leur jeu, le soleil suit sa courbe — œil de flamme du Temps veillant sur le jour immobile.

Ici ou ailleurs — arrêté un instant sur la pente abrupte, inaccessible dans la solitude des neiges  que l'aspiration de la terre élève vers la Lumière illimitable, et qui brisée, épuisée, s'interrompt soudain, ou dans l'étendue aveuglante, aride, ardente, austère de l'âme affamée du désert  un souffle, un cri, une lueur de la face de l'Éternité, en un fragment le Tout mystique.

Rien qu'un moment, mais empli de toute l'Éternité, seul, figé, intense,
échappant à la ronde de ces heures qui dansent et meurent, saisi par l'esprit-des-sens,
dans la grandeur d'un homme, sur les ailes éployées de la musique, dans un contact, un sourire, un son, quelque chose qui attend, qui erre et ne se fixe pas, un jadis Rien qui était tout et qui est découvert.

Sri Aurobindo, Poèmes (1900-1914),
In horis aeternum

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