Réjoui
par la lumière comme une brillante étoile qui accueille le matin,
Rayonnant,
très beau, resplendissant d'or, les cheveux ornés d'un bandeau précieux jetant mille feux, Pâris, arraché par le défi grec au chant et à la lyre,
Arriva, le visage et les yeux habités d'une joie inaltérable par le Destin.
Enfant de l'aurore toujours à jouer près d'un tournant des routes solaires,
Répondant au regard de la destinée avec un rire insouciant de camarade,
Égayant en chemin le domaine terrestre par sa vision de beauté et de délice,
Il passait à travers son péril et sa peine, en direction de l'Ombre ambiguë.
La dernière à quitter sa chambre de sommeil où elle était étendue dans la demeure iliaque
Au coeur de la maison avec les filles de Priam à la poitrine profonde,
Noble
et de haute taille, toute droite nimbée de jeunesse et de gloire,
Réclamant
le monde et la vie comme le fief de sa vaillance et de son courage,
Dans
l'encadrement d'une porte qui ouvrait sur des murmures et des rire lointains,
Capturant l'œil comme un sourire ou un rayon de soleil, se dessina Penthésilée.
Capturant l'œil comme un sourire ou un rayon de soleil, se dessina Penthésilée.
Du
seuil, en traversant le marbre, royale et souple,
Elle
cria au héraut, de sa voix puissante et terrible dans sa douceur:
"Qu'est-ce
qui, si rapidement, a chassé ton char des plages troyennes hantées parle vent,
Héraut,
alors que le soleil hésite encore derrière les montagnes ?
Viens-tu
à Troie, Talthybios, plus humble aujourd'hui que tu ne, vins jadis,
Quand
les ruisseaux de mon cher Orient chantaient tout bas a mon oreille, et non cet
Océan Retentissant, et que j'errais dans mes montagnes non encore appelée par
la voix d'Apollon ? Apportes-tu la paix à l'œil suave ou bien, plus doux à
Penthésilée,
Le
défi guerrier, quand les javelots pleuvent drus sur les boucliers des
combattants,
Qu'en
avant les roues s'élancent, légères, en chantant l'hymne d'Ares,
Que
dans ses champs la Mort besogne, et que le cœur est épris du danger ?
Que
dit Ulysse, l'Ithacien aux espoirs frustrés ? et que dit Agamemnon ?
Sont-ils
donc fatigués de la guerre, eux qui étaient prompts, hardis, triomphants,
Maintenant
que leurs dieux rechignent, que la victoire ne fonce pas du haut du ciel
Pour
sortir des nuages qui surplombent l'Ida à la tète des légions lumineuse
Armées
par le Destin, — maintenant que Pallas oublie, que Poséidon sommeille ?
Leurs
gorges de bronze sonnaient au combat comme fanfare de clairons ;
Ignorant
toute merci, ils criaient, ils cherchaient leur proie et couraient à la tuerie
Avec
la passion de limiers en chasse, jusqu'au jour ou une femme se porta
à
leur rencontre et les arrêta,
Et
où mon cri de guerre fit retentir la rive du Scamandre. Héraut d'Argos,
Que
disent les vantards de Grèce à la vierge Penthésilée ?"
Hautaine
fut la réponse de l'Argien face aux puissants de Troie,
"Princes
de Pergame, lionceaux qui cherchez rugissants la mêlée,
Souffrez
mon discours ! Il résonnera comme un coup de lance sur le cœur des Grands.
Ne
blâmez pas le héraut ; sa voix sert d'impulsion motrice, d'écho, de chenal
Tantôt
aux tambourins de la paix, tantôt aux tambours du combat,
Et
je ne viens pas de la part de quelque force prudente ou orateur au cœur tiède :
Je
viens de la part du Phthien. Il est connu de tous ! Superbe est son âme comme ses
fortunes,
Aussi
prompts que son épée et sa lance sont la parole et le courroux qui sortent de
sa poitrine.
Je
suis son envoyé, je suis le héraut des Argiens conquérants.
Qui
n'a entendu dans la nuit, lorsque les brises chuchotent et frissonnent,
La
voix affreuse d'un lion non rassasié et tenaillé par la faim,
Réclamant
sa proie des dieux ? Car il rôde à travers les ravins des montagnes,
Erre
telle une lueur inquiétante dans les bois, fatal et silencieux.
Ainsi
quelque temps il endure, quelque temps il cherche et souffre,
Encore
patient dans sa grâce terrible, comme assuré de son festin ;
Mais
le manque a été trop long, et voici qu'il dresse la tête et étonné, exaspéré,
Rugit
vers le ciel avec impatience. Sursautant, les vallées
Sont
terrifiées par l'épouvantable cri d'alarme, le bétail se rue vers l'abri.
S'armant,
les bouviers s'exhortent pour se réconforter et se donner courage."
Ainsi
parla Talthybios, comme un harpiste qui exprime son prélude
Utilise
les cordes les plus variées, cherche un accord ;
Longtemps
il prépare sa tonalité. Mais quelqu'un interrompit l'orateur,
Douce
était sa voix comme celle d'une harpe, bien qu'elle s'entendît en tête de
l'assaut,
Un
des fils du Destin, chéri par le peuple dont il causait la perte,
En
tête au Conseil, en tête au combat, le Priamide, qui dans sa beauté
Marchait
sans souci en semant les graines d'un désastre titanesque.
"Sans
doute tu as rêvé cette nuit, et tes rêves ne t'ont pas quitté au réveil !
N'as-tu pas ourdi tes paroles pour intimider
les enfants d'Argos
Qui,
assis dans l'ombre, alarmés, écoutent tout pâles leur nourrice ?
Grec,
tu te trouves à Ilion, et tu es devant ses princes.
Ne
dis pas tes mots mais ceux de ton roi. Si l'amitié en est la suave teneur,
Nous
embrasserons l'amitié d'Achille, mais par notre propre défi nous devancerons tout
défi,
Rencontrant
l'ennemi avant que de lui-même il ne cherche l'affrontement.
Telle
est la coutume des Troyens depuis que Phryx, s'arrêtant au bord de l'Hellespont,
Établit
Troie sur sa colline avec la Mer océane pour camarade et pour sœur."
Sri Aurobindo,
Ilion ou LA CHUTE DE TROIE, épopée,
Le Livre du héraut (Livre un- v.357à v.427 )
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