Toute la vie est un yoga. Par ce yoga intégral, nous ne cherchons pas seulement l'Infini: nous appelons l'Infini à se révéler lui-même dans la vie humaine. Sri Aurobindo SRI AUROBINDO - YOGA INTEGRAL: octobre 2016

SRI AUROBINDO
. . YOGA INTÉGRAL


Les négations de Dieu sont aussi utiles pour nous que Ses affirmations. Sri Aurobindo
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C'est le Supramental qu'il nous faut faire descendre, manifester, réaliser.

Une religion spirituelle de l'humanité



   Le pouvoir sauveur dont nous avons besoin, est le pouvoir d'un facteur psychologique nouveau qui, simultanément, donnera à l'humanité le besoin d'une vie unifiée et la forcera à respecter le principe de liberté. La religion de l'humanité semble être la seule force en cours qui tende dans cette direc­tion, car elle favorise le sens de l'unité humaine, elle a l'idée de l'espèce, et, pourtant, en même temps, elle respecte l'individu humain et les groupements humains naturels. Mais sa forme actuelle, intellectuelle, semble bien peu suffisante. L'idée, puissante en elle-même et dans ses effets, ne l'est cependant pas assez pour modeler la vie entière de l'espèce à son image. Elle doit faire trop de concessions au côté égoïste de la nature humaine — qui constituait la totalité de notre être autrefois et encore maintenant ses neuf-dixièmes — contre lequel sa vaste idée est en conflit. En outre, parce qu'elle s'appuie surtout sur la raison, elle a naturellement tendance à faire appel à la solution mécanique. Or, l'idée rationnelle finit toujours par devenir cap­tive de son mécanisme; elle devient l'esclave de son propre procédé trop astreignant. Survient une autre idée, avec une autre tournure dans sa machine logique, qui se révolte contre la première et brise le mécanisme, mais seulement pour y substi­tuer finalement un autre système mécanique, un autre credo, une autre formule, une autre pratique.
   Une religion spirituelle de l'humanité est l'espoir de l'avenir. Par là, nous n'entendons pas ce que d'habitude on appelle une religion universelle, un système, un credo, une croyance intel­lectuelle, un dogme ou un rite extérieur. L'humanité a essayé de réaliser l'unité par ce moyen ; elle a échoué et méritait d'échouer, car il ne peut pas y avoir de système religieux uni­versel doté d'un unique credo mental et d'une unique forme vitale. Certes, l'esprit intérieur est unique, mais plus que toute autre, la vie spirituelle exige la liberté, la variété d'expression et des moyens de développement. Une religion de l'humanité sup­pose la perception grandissante qu'il existe un Esprit secret, une Réalité divine en laquelle nous sommes tous un, que l'humanité est à présent sur la terre son plus haut véhicule, et que le genre humain et l'être humain sont les moyens par lesquels cette Réalité se révélera progressivement ici-bas. Elle implique un effort grandissant pour vivre cette connaissance et instaurer sur la terre le royaume de cet Esprit divin. Par la croissance de ce royaume en nous, l'unité avec nos semblables deviendra le principe gouvernant de toute notre vie — pas simplement un principe de coopération mais une fraternité plus profonde, un sens réel et intérieur de l'unité et de l'égalité, une vie commune à tous. L'individu doit comprendre que c'est seulement dans la vie de ses semblables que sa propre vie devient complète ; l'espèce doit comprendre que c'est seulement dans la libre plénitude de la vie individuelle que sa propre perfection et son bonheur permanent peuvent se fonder. Il faut aussi une disci­pline et un chemin de salut en harmonie avec cette religion, c'est-à-dire un moyen qui permette à chaque homme de faire grandir cette religion en lui-même afin qu'elle puisse grandir dans la vie de l'espèce. Examiner tout ce que ceci implique, serait un sujet trop vaste pour être abordé ici; il suffit de suggérer que c'est dans cette direction que se trouve la route finale. Sans doute, si ceci n'est qu'une idée comme toutes les autres, elle finira comme finissent toutes les idées. Mais si c'est vraiment une vérité de notre être, alors ce doit être la vérité vers laquelle tout s'achemine et en laquelle, tous, nous devons pou­voir trouver le moyen d'une unité humaine réelle, fondamen­tale, intérieure et complète, qui sera la seule base solide d'une unification de la vie humaine. Une identité spirituelle créant une identité psychologique sans dépendre d'aucune uniformité intellectuelle ou extérieure, qui imposerait une identité de vie sans être liée à aucun moyen mécanique d'unification, et qui serait toujours prête à enrichir sa solide unité par une libre variation intérieure et une expression extérieure librement va­riée, telle serait la base d'un type supérieur d'existence humaine.
Si pareille perception grandissait rapidement dans le genre humain, nous pourrions résoudre le problème de l'unification d'une manière plus profonde et plus vraie : en allant de la vérité intérieure aux formes extérieures. Jusque-là, l'effort d'unifica­tion par des moyens mécaniques doit continuer. Mais l'espoir plus haut de l'humanité dépend du nombre grandissant des hommes qui percevront cette vérité et chercheront à la faire grandir en eux-mêmes afin que, quand la pensée de l'homme sera prête à se libérer de son penchant mécanique — peut-être quand elle découvrira que toutes ses solutions mécaniques sont temporaires et décevantes —, la vérité de l'Esprit puisse faire son entrée dans le monde et conduire l'humanité sur le chemin de la perfection et du bonheur les plus hauts.



Sri Aurobindo, L’IDÉAL DE L’UNITÉ HUMAINE
CHAPITRE XXXV, Résumé et conclusion



Vers une organisation mondiale inter­nationale



    La poussée des forces vers une organisation mondiale inter­nationale aboutissant éventuellement à une unification lointaine (qui commence tout juste maintenant à se faire jour sous forme d'idée ou d'aspiration, bien que les causes qui l'aient rendue inévitable soient à l'œuvre depuis un certain temps), est imposée par les circonstances extérieures, par là pression des besoins et du milieu. Simultanément, aidé et stimulé par ces circonstances extérieures, s'est éveillé un sentiment cosmopolite, internatio­nal, encore assez nébuleux et vaguement idéal, qui peut accélérer la formation d'une union formelle. À lui seul, ce sentiment serait un ciment insuffisant pour préserver l'union mécanique que l'on pourrait créer, car il n'aurait certainement pas la fami­liarité ni la vigueur dont jouit le sentiment national. La seule provende substantielle qui l'aiderait à subsister, serait la com­modité de l'union. Or, l'expérience du passé montre que la seule force des commodités n'est pas assez puissante finalement pour résister à la pression des circonstances défavorables, au regain des vieilles forces centrifuges ou à la poussée effective de nouvelles forces de dissociation. Cependant, une force plus puissante' est à l'ouvre, une sorte de religion intellectuelle de l'humanité ; claire dans la pensée d'une élite, vaguement perçue en ses effets et sous ses déguisements par la multitude, elle a largement contribué à former les tendances de la pensée mo­derne et à orienter le développement de ses institutions. C'est une force psychologique et elle tend à dépasser la formule nationale, elle aspire à remplacer la religion du pays, et même, sous sa forme extrême, à détruire complètement le sentiment de nation et à abolir ses divisions afin de créer une unique nation du genre humain.
    Nous pouvons donc dire que cette tendance doit finalement prendre corps, quelle que soit la taille des difficultés; et elles sont vraiment énormes, beaucoup plus grandes que celles qui ont présidé à la formation de la nation. Si l'état peu satisfaisant des relations internationales actuelles doit conduire à une série de cataclysmes — qu'ils soient grands et d'importance mondiale comme la guerre actuelle ou d'une étendue plus limitée mais mondiaux par leur somme — et qu'avec l'interdépendance croissante des intérêts, ils frappent même ceux qu'ils ne touchent pas directement, alors, pour se défendre, l'humanité sera finale­ment obligée d'adopter un nouvel ordre de choses plus étroite­ment et plus rigoureusement unifié. Elle aura le choix entre l'unification et un lent suicide. Si la raison humaine est inca­pable de découvrir le moyen, la Nature elle-même ne manquera pas de susciter des bouleversements pour arriver à ses fins. Tôt ou tard, par conséquent, qu'elle soit créée par un sentiment d'unité grandissant, stimulée par l'intérêt et la commodité de tous ou par la pression évolutive des circonstances, nous pou­vons être sûrs qu'une unification finale, ou du moins quelque organisation formelle de la vie humaine sur la terre, est pra­tiquement inévitable, compte tenu toujours de l'imprévisible.


Sri Aurobindo, L’IDÉAL DE L’UNITÉ HUMAINE
CHAPITRE XXXV, Résumé et conclusion    


L'unité de l'espèce humaine




    En d'autres termes — et c'est la conclusion à laquelle nous arrivons —, il est possible d'édifier une unité précaire et tout à fait mécanique par des moyens politiques et administratifs, mais même si elle s'accomplit, l'unité de l'espèce humaine ne peut être viable et devenir réelle que si la religion de l'humanité, qui est à présent le plus haut idéal actif du genre humain, se spiritualise et devient la loi intérieure générale de la vie humaine.
    Une unité extérieure peut fort bien s'accomplir — et peut-être le temps n'en est-il pas loin, bien que ce ne soit nullement certain — parce qu'elle est l'aboutissement final et inévitable de la marche de la Nature dans la société humaine et que cette marche favorise des agrégats de plus en plus grands et ne peut manquer d'aboutir à une agrégation totale de l'humanité au sein d'un système international plus étroit.
    La marche de la Nature et ses moyens de réalisation dé­pendent de deux forces qui se combinent pour rendre inévitable l'agrégation plus grande. D'abord, nous avons le rapproche­ment croissant des intérêts communs, ou du moins l'entrelace­ment et la connexité des intérêts dans un champ de plus en plus large, qui font des anciennes divisions un obstacle et une cause de faiblesse, d'obstruction, de friction, et qui rendent le choc ou la collision créée par cette friction un calamité ruineuse pour tous, même pour le vainqueur qui doit payer un prix trop lourd pour le gain obtenu ; et même les gains escomptés deviennent de plus en plus difficiles à obtenir et le succès plus probléma­tique à mesure que la guerre se fait plus complexe et plus désastreuse. La prise de conscience grandissante de cette com­munauté ou cette connexité d'intérêts et la répugnance de plus en plus grande à affronter les conséquences d'une collision et d'un conflit ruineux, doivent nécessairement pousser les hommes à accueillir n'importe quel moyen susceptible de réduire les divisions qui engendrent de pareils désastres. Si ce mouvement de réduction des divisions reçoit un jour une forme définitive, ce sera le commencement d'une poussée conduisant à une union de plus en plus étroite. Si la Nature ne peut pas arriver à ses fins par ces moyens, si l'incohérence est trop grande pour que triomphe le mouvement d'unification, elle emploiera d'autres moyens, telles la guerre et la conquête, ou la domina­tion temporaire d'un État ou d'un empire puissant, ou encore la menace d'une domination de cette sorte afin d'obliger ceux qui se sentent menacés à adopter un système d'union plus étroit. Ce sont ces moyens-là et la force des nécessités extérieures que la Nature a employés pour créer les unités nationales et les em­pires nationaux ; et en dépit de certaines modifications dans les circonstances et le mode d'action, c'est au fond la même force et les mêmes moyens qu'elle est en train d'employer pour conduire le genre humain à une unification internationale.
    Mais en deuxième lieu, il existe aussi la force d'un sentiment unitif commun. Celui-ci peut agir de deux façons : survenir avant, comme une cause première ou auxiliaire, ou se produire après, comme un résultat qui cimente l'union. Dans le premier cas, le sentiment d'une unité plus vaste s'éveille parmi les unités qui étaient autrefois divisées et les pousse à chercher une forme d'union; alors, c'est surtout la force du sentiment et de l'idée qui effectue l'union ou qui vient secondairement en aide à d'autres événements et d'autres causes plus extérieures. Ob­servons que dans l'ancien temps, ce sentiment n'était pas très effectif, comme dans le cas des petits clans ou des nations régionales, et l'unité a dû normalement se faire sous la pression des circonstances extérieures, généralement les circonstances les plus grossières : la guerre et la conquête, la domination du plus puissant des belligérants ou des peuples voisins. Plus tard, la force du sentiment d'unité est devenue plus effective, soutenue comme elle l'était par une idée politique plus claire. Les grands agrégats nationaux se sont constitués par un simple acte de fédération ou d'union, bien que parfois cet acte ait dû être précédé d'une lutte commune pour la liberté ou d'une union de guerre contre un ennemi commun. Ainsi se sont unifiés les États-Unis, l'Italie, l'Allemagne et, plus pacifiquement, les fédé­rations de l'Australie et de l'Afrique du Sud. Mais en d'autres cas, particulièrement dans les premiers agrégats nationaux, le sentiment d'unité était en grande partie ou entièrement le ré­sultat d'une union formelle et extérieure ou mécanique. Mais en tout cas, que ce soit pour éveiller ce sentiment ou pour garantir sa croissance, le facteur psychologique est indispensable; sans lui, il ne peut y avoir d'union sûre ni durable. Son absence, c'est-à-dire l'incapacité de créer un sentiment d'unité ou de le rendre suffisamment vivant, naturel et vigoureux, a été la cause de la précarité des agrégats comme l'Autriche-Hongrie et du caractère éphémère des empires passés, et de même, à moins que les circonstances ne changent, elle causera probablement l'écroulement ou la désintégration des grands empires de nos jours.



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CHAPITRE XXXV, Résumé et conclusion

 

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