Jivanmukta
Il y a un silence plus vaste, inconnu
de l'esprit muet de la terre, immobile dans l'âme
devenue le socle de l'Éternité,
à jamais touchée par les infinitudes.
Une Splendeur, interdite aux yeux tournés vers la terre,
inonde un profond regard de feu qui voit tout ;
révélée, elle s'éveille quand la tranquillité de Dieu
encièle l'océan de l'immuable Nature.
Un Pouvoir descend qu'aucune Fatalité ne peut perturber ou vaincre,
plus calme que les montagnes, plus vaste que les flots en marche,
puissance unique de quiétude lumineuse
portant inlassablement les mondes et les âges.
La béatitude d'une extase sans fin nous embrasse,
une ivresse absolue, sublime, immortelle nous possède,
scellant l'amour à l'unité
dans l'étreinte du Très-Beau et Très-Aimé.
Celui qui échappe à la ronde monotone du Temps et tressaille,
ravi sans mots et sans pensée au sein de l'Éternel,
dévoile la forme et le signe de l'Être
établis sur les hauteurs dans le Silence omniscient.
Et s'il a consenti à revêtir ici un corps mortel,
il demeure l'Impérissable ; ignorant tout lien, toute limite ;
il joue tel un enfant sur le terrain des âges,
la vie et chacun de ses actes reflètent Sa magnificence.
Il n'agit et ne vit que pour donner à la Nature les forces de Dieu,
pour combler son attente, aider de sa Paix ailée d'immensité
son labeur torturé et guérir par la joie son antique douleur,
projetant la lumière sur l'inconsciente obscurité —
Choses vaines sont les buts plus étroits du mental
pour celui dont l'âme goûte et hautement possède
l'Infini et dont le Tout éternel
est le guide, l'aimé, le refuge.
Sri Aurobindo, Poèmes, 1930-1938
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire