Nous avons connu des souffrances et des luttes auprès desquelles les vôtres ne sont que jeux d'enfants; je n'ai pas aligné nos cas sur les vôtres. J'ai dit que l'Avatâr est celui qui vient ouvrir le Chemin pour l'humanité vers une conscience plus haute — si personne ne peut suivre le Chemin, alors ou bien notre conception de la chose, qui est également celle du Christ et de Krishna et du Bouddha, est tout du long une erreur, ou bien la vie et l'action de l'Avatâr sont entièrement et parfaitement vaines. X semble dire qu'il n'y a pas moyen de suivre, que ce n'est pas possible, que les luttes et les souffrances de l'Avatâr sont irréelles, que c'est de la blague — qu'il n'y a pas de possibilité de lutte pour celui qui représente le Divin. Une telle conception rend absurde toute l'idée de la qualité d'Avatar qui n'a par suite pas de raison d'être, pas de nécessité, pas de sens. Le Divin étant tout-puissant peut soulever les gens sans se soucier de descendre sur terre. C'est seulement s'il est compris dans l'arrangement universel qu'Il doive prendre sur Lui le fardeau de l'humanité et ouvrir le Chemin que la condition d'Avatâr a un sens. 7-3-1935
Vous dites que ce chemin est trop difficile pour vous et vos semblables, et que seuls des "Avatars" comme moi-même et la Mère peuvent le prendre. C'est un étrange malentendu; car au contraire, c'est la voie la plus facile et la plus simple et la plus directe, et n'importe qui peut la prendre, s'il calme son mental et son vital; même ceux qui n'ont qu'un dixième de votre capacité le peuvent. C'est l'autre voie — de tension, de pression et d'effort pénible — qui est difficile et requiert une grande force de tapasyâ. Quant à la Mère et à moi, il nous a fallu essayer tous les chemins, suivre toutes les méthodes, vaincre des montagnes de difficultés, porter un fardeau considérablement plus lourd que vous-même ou quiconque à l'Ashram ou à l'extérieur n'en avez porté, supporter des conditions beaucoup plus difficiles, livrer des combats, endurer des blessures, nous frayer des chemins à travers des marécages, des déserts et des forêts impénétrables, conquérir des masses hostiles — un travail tel, j'en suis certain, que nul, avant nous, n'avait jamais dû en accomplir. Car le Guide sur le Chemin, dans un travail comme le nôtre, doit non seulement faire descendre et représenter et incarner le Divin, mais représenter aussi l'élément de l'humanité et porter le fardeau entier de l'humanité et éprouver non en un simple jeu, une lîlâ, mais le plus sérieusement du monde toute l'obstruction, toute la difficulté, toute l'opposition, tout le labeur contrarié, entravé et seulement peu à peu couronné de succès qui se présentent sur le Chemin. Mais il n'est ni nécessaire, ni tolérable que tout cela soit entièrement répété dans l'expérience des autres. C'est parce que nous avons l'expérience complète que nous pouvons montrer aux autres une route plus droite et plus facile — si seulement ils consentent à la prendre. C'est à cause de notre expérience, qui a été payée un prix exorbitant, que nous pouvons vous encourager ainsi, vous et les autres : "Prenez l'attitude psychique; suivez tout droit la voie ensoleillée, le Divin vous soutenant ouvertement ou secrètement — si c'est secrètement, Il se montrera quand même en temps voulu —, n'insistez pas sur le côté pénible et difficile, plein d'entraves et de détours, du voyage." 5.5.1932
Sri Aurobindo "Letters on Yoga".
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