Dans le jardin, un papillon s'approche en voletant, dépasse un papayer et deux arbres en fleurs. D'ordinaire il serait attiré par l'un de ces trois objets de désir. Il vole sans les remarquer, arrive au mur en vol direct, puis, contrairement à toute attente-, fait soudainement demi-tour vers l'arbre fleuri de droite, joue deux secondes avec un autre papillon, puis s'éloigne en passant près du papayer. Qu'est-ce qui a dicté son retour, puis son vol ?
D'abord le papillon n'a pas remarqué les arbres fleuris car son mental était fixé sur un objet plus éloigné présent dans sa mémoire instinctive ; mais par la loi du mental, il a reçu de façon subconsciente l'impression du parfum des fleurs. Au moment d'atteindre le mur cette impression est venu au mental supraliminaire comme un sens vague mais puissant d'une chose attractive manquée en chemin. Par l'instinct vital & d'envie d'impulsion vitale qui déterminent de façon prédominante les mouvements de l'insecte, cette sensation a immédiatement imposé un retour en arrière. Sans l'intervention de l'autre papillon, il est probable qu'à ce second contact avec le parfum des fleurs, le vague sens se serait identifié, consciemment ou subconsciemment, avec une impression supraliminaire précise, & le vol vers les fleurs se serait déterminé ; mais à cause de la diversion, le sens est resté vague, l'impression en partie oblitérée, et seule est restée l'idée de retour à quelque chose de distant. L'impression était pourtant assez forte pour détourner l'insecte de son semblable, car particulièrement concerné par les fleurs il n'a pas répondu à ses sollicitations. Le papillon a donc poursuivi son vol en s'éloignant.
Sri Aurobindo, Journal du Yoga, 24-31 Octobre 1927
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